memoires - Archive ouverte en Histoire etPhilosophie des Sciences et des Techniques Accéder directement au contenu

 







DUMAS & TEL
sont deux plateformes d'archivage en ligne déclinées à partir du portail HAL du CCSD (Centre pour la Communication Scientifique Directe - UMS3668).

 

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DUMAS
Plateforme de "Dépôt Universitaire de Mémoires Après Soutenance"
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Derniers mémoires recensés

Le mémoire considère un groupe de travail oeuvrant collectivement à la fabrication d'une pirogue : au-delà de l'activité technique et de la chaîne opératoire, il présente l'organisation du groupe (par encastrement du psychologique dans le social et le physique) ainsi qu'une vision d'ensemble des modes de production scientifiques. Le terrain a été réalisé en Guyane française, dans l'ethnie Djuka.

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Après avoir été effrayé à l’idée de voyager par plaisir en raison de la connotation guerrière de cette dernière mais également d’une peur des reliefs naturels, une nouvelle perception renverse à la fin du XVIe siècle cette pensée. La conception utilitaire du voyage prend l'ascendant au cours du siècle suivant, avec la possibilité d'apprendre et de se forger une culture personnelle jugée essentielle aux nobles de cette époque. Cette conception évolue à nouveau grâce à l'influence des Lumières et de nombreuses découvertes scientifiques ou philosophiques du XVIIIe siècle. La pratique voyageuse est maintenant comprise comme un moyen de connaître la terre, de partager les savoirs pour une plus grande égalité. Dans ce contexte, les scientifiques sont devenues des acteurs centraux, notamment en se rendant directement sur les lieux à expertiser. Ainsi, en plus d'une large publication d'imprimés de relation de voyage fait par des nobles en mission diplomatique ou dans la réalisation de leurs Grands Tours, se développent en parallèle des mémoires scientifiques tirés de leurs voyages. Dans la même période, un nouvel acteur dans le chaînon de l'imprimerie vient bouleverser l'ordre établi au siècle précédent, les périodiques. C'est avec ce nouveau support que les savants-voyageurs ont diffusé non seulement des extraits de leurs mémoires mais également des lettres, des synthèses et des questionnements portants sur les avancées scientifiques. Dans ce microcosme où vivent savants et acteurs de l'impression, de nombreux d’échanges et interactions s’étiolent, tels que des demandes d'instructions spécifiques ou d'aide particulière pour récupérer divers échantillons provenant d'une région lointaine. Cet ensemble se représente également à travers le carnet, un outil essentiel à la sauvegarde des pensées du voyageur qui le suit en toutes circonstances au cours de ses trajets. C'est avec cette source que ce mémoire se propose de retracer la méthodologie d'un savant-voyageur au tournant du XVIIIe siècle en la personne du chevalier Déodat de Dolomieu. Au travers de ses carnets se dévoile les traces de sa pensée savante et des évolutions de cette dernière au cours de ses pérégrinations, permettant la reconstruction d'une méthodologie propre à ce dernier. De même, elle permet la sauvegarde des humeurs de son propriétaire au cours de ses trajets mettant en lumière sa perception de la pratique voyageuse. Enfin, ce même objet se révèle être l'outil le plus essentiel à la propre compréhension de sa conception aux yeux de son propriétaire, ainsi que de pouvoir distinguer si cela est réellement nécessaire les propriétés entre une relation de voyages pour son plaisir et celui d'une relation savante faite pour autrui.

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Notre projet de mémoire, ci-dessous développé, est le suivant : comment étudier la notion d'émergence dans le cadre de la métaphysique anglo-saxonne contemporaine ? Pour répondre à cette question, notre réflexion partira du système ontologique particulier, à savoir le "carré ontologique", d'inspiration aristotélicienne et repris par un auteur contemporain, E.J. Lowe. Dans ce système, les catégories ontologique d'"objet", de "phénomène", de "propriété" et de "condition" sont analysées comme étant fondamentales, irréductibles et suffisantes pour décrire tout le contenu de la réalité. Nous nous sommes limités cette année à la présentation de ce système, espérant par la suite pouvoir le développer dans le sens d'un physicalisme non réductif. Notre thèse finale sera alors la suivante : il est possible que de nouvelles conditions émergent.

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Nous proposons à travers ce travail de regarder la pensée philosophique comme étant essentiellement liée au phénomène d'ἀνάμνησις, c'est-à-dire au ressouvenir ou à l'anamnèse. Nous cherchons à repenser le propre du philosopher. Dans cette optique, philosopher signifie "se ressouvenir". Pourtant, l'anamnèse n'a pas affaire à la mémoire et aux souvenirs. Elle est expérience, à travers laquelle adviennent une vérité et un savoir. Notre point de départ se trouve dans une évidence de la pensée philosophique : la pensée a une histoire et s'enracine dans une tradition. Tout ce qu'on met devant la pensée, tout ce que la pensée prend comme tâche a un lien avec ce qui a été pensé auparavant ou fait référence à ce qui a été, qu'on l'admette ou non. Nous identifions, cachée sous la forme de cette évidence, une tendance de la pensée philosophique qui n'a pas été mise en question ou explicitée. Ainsi, philosopher c'est dans un certain sens se retourner vers le passé afin de le reprendre sous un jour nouveau. Ce point de départ trouve sa confirmation philosophique à travers une analyse "historique" : l'anamnèse chez Platon et Gadamer. C'est à travers cette façon de mettre à l'œuvre ce que l'évidence nous a dévoilé qu'on découvre que l'anamnèse décrit la recherche et la découverte de type philosophique. Pour Platon, l'άνάμνησις représente moins une actualisation d'un savoir tout fait, inné et latent, qu'une manière de reprendre quelque chose de "su" sous un jour nouveau. C'est donc ce mouvement "rétrospectif" qui rend possible le savoir et la vérité pour la pensée philosophique. Selon Gadamer, l'άνάμνησις platonicienne s'apparente à une re-connaissance. Ces deux analyses dévoilent une certaine "structure" que possède l'anamnèse, un certain mode d'être : elle se définit par le "re-". Il s'agit d'un re-vivre, re-connaître, re-conquérir, re-voir "à distance" la réalité. Ceci renvoie à l'idée de "voir" les choses "dans une autre lumière", ou faire une nouvelle expérience des choses qui apporterait un surcroit de connaissance. Le "re-" de l'anamnèse désigne le fait de re-faire une "expérience". L'anamnèse représente une expérience du philosopher. Philosopher et parvenir à un savoir signifie, dans ce sens, faire l'expérience de l'expérience.

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Le débat sur la nature de la relation entre écologie et écologisme repose principalement sur des présupposés épistémologiques quant au statut de l'écologie et quant à la façon dont elle doit prendre en compte les activités humaines. L'écologie peut être considérée comme une partie de la biologie, comme une science naturelle interdisciplinaire, ou comme une science interdisciplinaire qui fait le pont entre sciences de la nature et sciences de l'homme. La prise en compte de la spécificité culturelle de l'homme dans son rapport aux écosystèmes et à la biosphère dépend donc du statut que l'on donne à l'écologie.

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Cette étude tente de répondre à la question "qu'est-ce que le jazz ?" en partant des spécificités musicologiques propres à cette musique pour rejoindre la pensée sociale et culturelle du jazz. Plus qu'un simple travail de définition, il s'agit d'analyser le jazz pour en extraire ses valeurs, d'interpréter les phénomènes musicaux jazzistiques en les plaçant toujours déjà dans un contexte historique et social déterminé. Penser le jazz, c'est établir son unité esthétique. Pourtant, on n'épuise pas le phénomène jazzistique à parler de swing et de sonorité : penser le jazz c'est aussi comprendre les origines musicales d'une telle musique et donc utiliser une méthode généalogique permettant de comprendre pourquoi, un jour, des hommes ont joué de la musique de telle manière. Le discours musicologique s'ouvre à la philosophie sociale et aux sciences historiques. Penser le jazz, c'est alors comprendre qu'il est une musique populaire, issu de la rencontre brutale des musique occidentale et africaine dans le contexte de la ségrégation raciale. Si certains discours sur la musique font de l'abstraction leur crédo, un discours sur le jazz semble devoir nécessairement prendre en compte les contextes socio-historiques dans lesquelles on joue du jazz. Le jazz se joue, se danse, s'incarne dans des gestes, des attitudes et des corps, et ce faisant, véhicule une pensée musicale que l'on ne peut pas comprendre si l'on s'en tient à une analyse musicologique. Penser le jazz comme pensée, ériger le jazz en porte d'entrée privilégiée d'une culture américaine naissante, comprendre l'encrage de la musique de jazz dans la Weltanschauung américaine sont les enjeux de cette étude qui donne en outre des pistes tant méthodologiques que généalogiques pour entreprendre une analyse des musiques populaires postérieures au jazz.

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S'interroger sur le clonage, c'est s'interroger sur ce qu'il produit, à savoir le clone, le double, dont il s'agira pour nous d'appréhender le sens et de voir en quoi cet être recréé, reproduit par clonage présente une figure complexe, en quoi il représente un être particulier, au statut quelque peu singulier. Il importe donc de définir ce que signifie, ontologiquement et symboliquement, l'action même de cloner et de définir ainsi ce que signifie l'existence d'un clone. En effet, la question du clonage ne peut être séparée de la question même du clone puisque sans clone, il n'y aurait pas lieu de parler de clonage. Par ailleurs, il nous faut définir ce qu'est scientifiquement le clonage. Nous montrerons alors que les définitions mènent parfois à des quiproquos et des illusions qui n'ont pas lieu d'être une fois le terme clairement défini.

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Les derniers écrits (1946-51) de Wittgenstein s'occupent principalement de philosophie de la psychologie et s'attaquent à certaines théories classiques de l'esprit, que les commentateurs qualifient de mythologies. Notre travail consiste à évaluer la possibilité de la présence de ces mythologies de l'esprit à l'intérieur des théories construites par les sciences psychologiques ainsi que les implications sur la psychologie que cette présence est susceptible d'avoir. En nous appuyant sur certains des points centraux de la critique wittgensteinienne (l'usage ordinaire, la distinction conceptuel / empirique, etc.), nous montrons qu'il est envisageable de dégager des thèses, d'inspiration wittgensteinienne, délimitant les prétentions de la psychologie. L'œuvre de Wittgenstein fournirait donc un outil, dans une mesure que nous nous efforçons d'apprécier, pour une mise en débat de la scientificité de la psychologie, en particulier des neurosciences cognitives.

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Ce mémoire s'intéresse aux collaborations possibles entre Intelligence Artificielle et philosophie. Il montre que les deux disciplines peuvent partager des objets, des théories et des résultats pour apprendre l'une de l'autre. La stratégie de ce mémoire consiste à expliciter des relations épistémologiques entre les problématiques propres aux deux disciplines ("IA faible" et "IA forte"), afin de définir des modes de collaboration sur le plan disciplinaire. La deuxième partie de ce mémoire présente les travaux de philosophes et de spécialistes de l'IA, depuis les débuts de l'Intelligence Artificielle jusqu'aux années 80. Elle expose les démarches collaboratives exploitées par ces chercheurs, de manière implicite ou explicite. La troisième partie présente des travaux où la philosophie sert de socle conceptuel à l'Intelligence Artificielle, notamment en ce qui concerne la simulation de phénomènes émergents. La quatrième partie réalise un renversement des relations classiques entre les deux disciplines. C'est au tour de l'Intelligence Artificielle de se mettre au service de la philosophie, en formulant de nouvelles hypothèses de recherche ou en testant les théories philosophiques à partir de cas concrets. Ce mémoire, enfin, espère œuvrer pour le rapprochement des deux disciplines et ainsi encourager philosophes et spécialistes de l'IA à collaborer sur les sujets qui leurs sont chers.

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TEL
Serveur de "Thèses en Ligne"
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Dernières thèses ou HDR recensées

Certaines applications issues des biotechnologies sont actuellement controversées d’un point de vue sociotechnique. A l’analyse, il s’avère que les protagonistes de ces controverses utilisent des arguments évolutionnistes de façon récurrente à propos de questions très diverses et parfois de façon apparemment contradictoire. Afin de comprendre les raisons d’un tel usage, d’une part, nous avons procédé dans cette thèse à une analyse de discours des controverses relatives au diagnostic préimplantatoire (DPI) et aux OGM agricoles à partir d’essais et d’articles issus de revues spécialisées ou de vulgarisation. D’autre part, nous avons effectué une étude de l’histoire de l’évolutionnisme scientifique et non scientifique. Nous avons ainsi pu établir que se rejoue à travers ces controverses sociotechniques une partie des controverses structurantes de la pensée évolutionniste et que l’évolutionnisme constitue un cadre de représentations prégnant permettant de débattre collectivement des nouvelles techniques du vivant.

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Le but de notre thèse est d'analyser la production de discours concernant les paradoxes par les intellectuels occidentaux. Ceux-ci seront nos sujets d'étude. Un texte ne sera jamais lu pour lui-même, dans l'absolu, mais sera, au contraire, toujours considéré en tant qu'il est interprété par un tel sujet. C'est la donnée d'un texte et d'un sujet qui constituera un paradoxe. Dans ce cadre, le paradoxe est pour nous un énoncé écrit ou oral présentant de façon assertive une situation concrète facilement compréhensible : même si les sujets ne s'accordent pas sur le sens profond à donner à cet énoncé, nous demandons que sa signification superficielle leur soit immédiatement accessible. Il est également un phénomène cognitif : quand il est présenté à un sujet, il déclenche automatiquement chez lui un phénomène réflexif important suscité par un sentiment de paradoxal, une forme de perplexité. Celle-ci naît de ce que malgré une satisfaction intellectuelle du sujet (traduisant une analyse convaincante du paradoxe), celui-ci éprouve une insatisfaction cognitive (traduisant un conflit des représentations concernant le paradoxe). Le paradoxe est enfin un phénomène social par le rôle des discours qu'il suscite, qu'il permet ou qu'il nécessite. Précisément, nous définirons le paradoxe comme une histoire simple et brève (dont l'interprétation est pourtant grandement variable entre les individus) recelant une contradiction, source de perplexité, c'est à dire une opposition forte parmi les représentations suscitées par l'histoire. Notre thèse vise à montrer que les paradoxes, tels qu'ils sont interprétés par les sujets, se répartissent en trois classes engendrant des réactions spécifiques chez les sujets, aussi bien sur le plan psychologique ou cognitif que socio-historique. Nous basons cette classification sur une analyse logique à gros traits de l'histoire du paradoxe, ainsi que sur la notion d'errance (qui marque la séparation entre satisfactions intellectuelle et cognitive). La première phase logique de l'histoire d'un paradoxe est la présentation d'une situation, servant de point de départ, d'hypothèses, à toutes les considérations exposées ultérieurement. Si ce point de départ suscite chez le sujet des représentations contradictoires, il y a errance dans les représentations du monde (cosmos, en grec) par le sujet, et le paradoxe sera qualifié de paracosmie. La seconde phase logique d'une histoire paradoxale, est le raisonnement qui conduit le sujet d'une conception éventuellement non problématique à un constat contradictoire. Cette phase s'apparente à une démonstration : elle est constituée d'étapes dont le principe est (intellectuellement) admis par le sujet. Si cette phase introduit un glissement significatif de représentations cohérentes à des représentations contradictoires (à tort ou à raison), il y a errance dans le raisonnement (logos, en grec) du sujet, et le paradoxe sera qualifié de paralogie. Enfin, dans une troisième phase logique, le sujet tire les leçons de la phase démonstrative, élabore ses conclusions. S'il se fourvoie entre ses moyens logiques et les attendus qu'il leur confère ou si, simplement, il ne peut parvenir à aucune conclusion raisonnable, il y a errance dans la phase conclusive, et le paradoxe est une paradoxie (ce terme souligne que l'errance est de l'ordre de l'opinion, doxa en grec). Les trois parties de notre thèse reprennent ces trois classes. Pour chacune, il s'agit de la décrire, c'est à dire de rendre opératoire notre classification, et d'exposer ses traits particuliers, c'est à dire de montrer la pertinence de notre partition. II. Les dilemmes logiques II.1. Présentation des dilemmes Les dilemmes sont clairement attestés depuis l'Antiquité. Eubulide (4e s. AEC) propose ainsi le célèbre paradoxe du Menteur souvent présenté à l'époque moderne sous la forme du paradoxe d'Epiménide (le célèbre Crétois Epiménide dit "tous les Crétois sont des menteurs"). L'étude de ce dernier souligne que l'existence d'un paradoxe dans un énoncé dépend considérablement de la lecture qu'en fait le sujet : si celui-ci l'entend précisément, alors l'énoncé n'est pas paradoxal puisque la négation de la phrase épiménidienne est "certains Crétois ne mentent pas", ce qui est vrai, tandis que si le sujet l'entend de manière imprécise, la négation sera entendue (sensiblement) comme "tous les Crétois disent vrai", qui entretient le paradoxe. Nous insistons également que même quand le paradoxe semble être "résolu", ici par une précision sémantique, ceci ne constitue pas un traitement de fonds : le cas où un seul Crétois serait en train de parler fait resurgir le paradoxe. Les dilemmes présentent en eux-même un intéressant paradoxe, que nous nommons le "paradoxe des paradoxes" : Ils semblent parfois n'avoir intrinsèquement pas de solution, ce à quoi pourraient répliquer de nombreux penseurs "on ne peut dire cela, voyez ma solution,…" et de là une quantité de "solutions" fort différentes,… qui pour trancher nécessitent de reprendre le paradoxe à zéro. Chaque solution, considérée entre autres, semble éclairer toujours moins le paradoxe alors que, considérée seule, elle semble le résoudre. II.2. Les différents types de dilemmes II.2.ii à iv. La structure des dilemmes Les dilemmes logiques, en première analyse, sont les paradoxes basés sur une autoréférence (une des conclusions intermédiaires de la démonstration du paradoxe fait référence à elle-même) en général apparente. Cette autoréférence n'est pas toujours directe : elle peut nécessiter un certain nombre d'intermédiaires, de relais (A dit B vraie et B dit A fausse, C se dit fausse sachant D, etc.). Par ailleurs le nombre et la qualité de ces relais dépendent toujours du niveau d'analyse auquel on décide de se placer ; il n'est pas intrinsèque (faut-il expliciter le modus ponens ou le considérer comme évident, etc.). La modalité de l'autoréférence n'est pas seulement affirmative (A dit B vraie, resp. fausse), elle peut également concerner une croyance ou une connaissance, un doute, un devoir, une promesse ou un serment, etc. Cette modalité n'est pas nécessairement déclarative mais peut aussi résulter du sens donné à certains mots ou du contenu de certains concepts ("Dieu est omnipotent mais peut-il créer un roc que nul (y compris Lui) ne puisse soulever ?"). Si on considère la modalité "est démontrable" le théorème d'incomplétude de Gödel est un tel dilemme (il se ramène pour l'essentiel à "cette proposition n'est pas démontrable"). Si le sujet possède l'intuition du théorème de Löb, alors la contradiction est seulement légère, et il n'y a pas dilemme ; dans le cas contraire, elle est forte et le paradoxe est proche du Menteur, tout en ayant la force d'un théorème mathématique. De plus, l'autoréférence n'est pas nécessairement donnée immédiatement : elle peut nécessiter un traitement volontaire de décodage (traduction, anagramme, symbole, calcul ou démonstration, etc.). Toute la performance de l'énoncé peut être convoquée pour en faire un paradoxe, et ce par un procédé qui n'est pas nécessairement explicitement fourni au sujet. Enfin, nous insistons que cette autoréférence n'est pas seulement négative. Les adages de Buridan (comme "cette phrase est vraie") engendrent également des dilemmes. La contradiction que recèlent les dilemmes n'est donc pas tant logique que pragmatique : elle résulte d'une opposition de conclusions. Affirmer que les phrases dont la signification repose sur une autoréférence n'ont pas de sens ne peut être, en soi, une solution aux dilemmes. En effet leur modalité d'autoréférence peut être renforcée de façon à retrouver le paradoxe (le Menteur et l'Adage peuvent se renforcer en "cette phrase n'a pas de sens" ou "cette phrase a un sens"). II.2.v. Les solutions par reformulation non problématique Dans la mesure où la paradoxalité d'un énoncé dépend de son interprétation, nombre de dilemmes sont résolus en les interprétant d'une façon non problématique (l'Epiménide peut être entendu précisément). Cependant ces solutions s'avèrent toujours fragiles : le paradoxe peut généralement être ressuscité soit par une reformulation de la reformulation (reformulations successives) soit par une reformulation concurrente (reformulations parallèles). III.3. Aspects historiques de la discussion des dilemmes L'opinion est dominante que la discussion des dilemmes est continue depuis l'Antiquité ; ceci est doublement faux. D'une part, seules trois époques historiques de discussion apparaissent en Occident : l'Antiquité grecque (du 5e s. AEC au 3e s. AEC, peut être au-delà mais en tout cas pas plus tard que le 2e ou 3e s. EC), le Moyen âge scolastique (de la fin du 12e s. au milieu du 15e s.) et le 20e s. Entre ces époques certains paradoxes ont pu être sporadiquement évoqués sous forme d'énigmes, mais il n'existe aucune trace d'une discussion écrite construite. D'autre part, la discussion à chacune de ces époques est séparée des discussions antérieures qui apparaissent d'abord incommensurables : le débat commence toujours quasi tabula rasa. III.3.ii. Les insolubles au Moyen Âge Notre notion de dilemme inclut essentiellement ce que les penseurs médiévaux appelaient "insolubile". Dans le cadre des formidables investigations logiques de cette époque, ceux-ci constituent une question à part, d'une grande importance théorique. Ils sont envisagés généralement froidement comme un type particulier de "sophisme". L'angle initial d'étude n'en fait pas une question philosophique centrale. La première approche théorique médiévale aurait été celle de la "cassatio" (cassation, annulation) qui décrétait simplement les insolubles nuls ou vides de sens : celui qui profère un Menteur ne dit rien, ou : il est impossible de proférer (réellement) un Menteur. Très vite cette solution, qui était commune d'après les sources, est tournée en ridicule et se développent des solutions de "restrictio" (restriction) dont l'objectif est de délimiter l'usage correct du langage. Les insolubles découlent selon ces analyses d'un mauvais usage des règles des obligations (du débat universitaire) ; selon les cas : un tout ne peut faire référence à une de ses parties, une proposition ne peut faire référence qu'à une proposition antérieure, le sens d'une proposition est la cause de son adéquation au monde, il faut distinguer deux sens de la modalité d'assertion, etc. Ces solutions s'avèrent toutes trop fortes et/ou trop faibles : elles ne peuvent bloquer certains insolubles (généralement les Menteurs à relais) ou, au contraire, bloquent jusqu'à des propositions élémentaires ("toute proposition est vraie ou fausse"). Une nouvelle approche devient nécessaire ; elle sera lancée par Bradwardine qui refuse de se placer au niveau du paradoxe et décide de l'étudier systématiquement d'une perspective métalinguistique. Son analyse, pour la première fois dans cette discussion, se fonde sur une théorie de la vérité. Cette approche est principalement développée par Roger Swyneshed, Heytesbury, et, dans une moindre mesure, Albert de Saxe. Ces théories sont des théories de la vérité par correspondance (le vrai et le faux sont définis en termes d'adéquation à ce qui est). Un trait marquant de la discussion médiévale est la référence constante à Aristote et à sa solution, dite secundum quid et simpliciter, qui ne doit pas faire illusion ; ce terme est toujours employé comme référence d'autorité : chaque auteur lit sa solution chez le Stagirite, en particulier les plus novateurs tels que Bradwardine. III.3.iii. Le pseudomenon et les antinomies antiques Le paradoxe du Menteur apparaît en Occident comme une expérience de langage développée par Eubulide de Milet (4e s. AEC), philosophe de l'école de Mégare. Cette école, dans la lignée des Eléates, développe de nombreux arguments servant d'exemples à la réflexion rationnelle ou de contre-exemples à certaines thèses. Leur œuvre et plusieurs de leurs objectifs théoriques, dont les études logiques, seront prolongés par les stoïciens. Le paradoxe d'Epiménide, s'il se réfère bien à une évocation par saint Paul d'une célèbre formule d'Epiménide de Cnossos (fl. 7e-6e s. AEC), parfois compté parmi les Sept Sages de l'Antiquité, n'est cependant pas attesté, en tant que paradoxe, avant l'époque moderne. La première trace écrite d'une discussion d'un dilemme logique remonte à Aristote (vers 330 AEC). Cet auteur suggère une discussion antérieure. Lui-même, malgré des interprétations diverses de sa contribution, propose une reformulation fondé sur une distinction (ou temporelle ou sémantique). Son successeur, Théophraste d'Erèse (fin 4e-début 3e s. AEC), écrit un ouvrage de trois volumes sur la question, ce qui suggère au moins une solution par restrictio. Chez les stoïciens, il semble que le débat sur les paradoxes ait été très important : leur solution sera comptée comme un de leurs principaux achèvements (cf. Lucien, Cicéron). Chrysippe le stoïcien (3e s. AEC), le plus fameux logicien de l'Antiquité aurait écrit deux introductions et quatre ouvrages de plusieurs tomes sur cette seule question. Il semble avoir dépassé la restrictio et avoir traité les dilemmes logiques au moyen de sa théorie de la signification. III.3.iv. Le Menteur moderne Les contributions modernes à la discussion des dilemmes logiques sont principalement produites dans le contexte de la philosophie du langage, et s'intègrent essentiellement à la philosophie anglo-saxonne ou analytique. Malgré quelques traitements antérieurs sporadiques (Peirce au 19e s.), la discussion des dilemmes prend place à la toute fin du 19e avec les paradoxes de la théorie des ensembles, dans un contexte de crise (la "crise des fondements"). Quelques solutions de cassatio sont proposées (dans un fameux débat entre Russell et Poincaré) mais vite écartées. Russell propose successivement diverses solutions de restrictio, dont la théorie des types. En 1925, Ramsey sépare les dilemmes en paradoxes "logiques" et "sémantiques". Au premiers seront appliquées les théories de Russell (simplifiées par Ramsey), qui seront relayées, pour les seconds par la théorie des niveaux de langage de Tarski (1933-1935, c'est la fameuse distinction langage/métalangage). Ces trois contributions constituent l'état classique de la discussion ; il s'imposera pendant une trentaine d'années dans la discussion et est toujours largement accepté hors de celle-ci. Durant ce laps de temps, la solution tarskienne, qui pouvait être lue comme une restrictio, prend toute sa signification de théorie de la vérité. La notion de vérité, sur laquelle de nombreux soupçons (théoriques) s'étaient posés, est pleinement réhabilitée. Vers les années 1960, elle montre de nombreuses faiblesses théoriques et d'autres théories de la vérité prennent sa succession (sans être largement acceptées). L'autoréférence, largement considérée comme incohérente jusqu'alors (mais abondamment convoquée par les sciences humaines), est réhabilitée. Dans les années 1970 se développent, alternativement aux théories de la vérité à niveaux de langage, des théories basées sur l'existence de lacune de valeur de vérité (gap theories, litt. "théories du trou"). Très vite ces théories dérivent vers une évaluation l'extension de la vérité. La discussion entre alors dans une quatrième phase : le calcul de la vérité. La principale contribution dans cette voie sera la théorie de la vérité comme point fixe proposée par Kripke. La discussion moderne présente plusieurs phénomènes remarquables. Tout d'abord, nous relevons une considérable inflation théorique, auteur par auteur, à mettre probablement en parallèle avec le fait qu'aucune théorie ne s'impose durablement. Nous observons ensuite que notre époque est très intéressée par la production théorique des époques précédentes (ou au moins par l'existence de celle-ci). Pour autant, les relations historiques que l'on peut trouver dans les articles de discussion, voire dans certains articles historiques, sont généralement infondées, souvent erronées et parfois proprement fantaisistes, et ce malgré l'existence de travaux historiques de qualité aux même dates. Ainsi : le Menteur n'est pas, historiquement, l'Epiménide et ce dernier n'est pas connu depuis l'Antiquité (saint Paul n'expose pas un paradoxe) ; Epiménide n'est ni un être fabuleux, ni l'auteur du paradoxe ; Occam ne fut pas le chef de file du combat de l'autoréférence ; etc. III.4. Analyse des dilemmes III.4.i. Les principaux traits historiques des discussions des dilemmes Dans les contextes stoïcien, scolastique et logiciste la question des dilemmes apparaît comme importante théoriquement. Dans les trois cas la discussion est portée par des écoles composées de penseurs-artisans nombreux plutôt que de savants-artistes isolés. Dans la discussion, aucun accord sur une solution particulière n'apparaît. Celle-ci est marquée par trois phases principales dans les approches du problème, la cassation des énoncés paradoxaux, la restriction de l'autoréférence et l'élaboration de théories de la vérité, éventuellement suivies par une phase où l'on s'intéresse plus à l'extension de la vérité qu'à sa définition. Dans tous les cas, cependant, la production théorique sur les dilemmes vise toujours leur résolution. III.4.ii. Dilemmes logiques et paradoxies Après avoir étudié les dilemmes par l'exemple, nous montrons qu'ils sont exactement les paradoxies de notre classification. Nous soulignons d'abord que la contradiction des dilemmes est pragmatique : le sujet ne peut résoudre de façon ferme et définitive la perplexité sémantique issue de ces paradoxes. Nous montrons ensuite que ces paradoxes ne sont ni des paracosmies ni des paralogies mais bien des paradoxies. Nous voyons enfin que les paradoxies sont des dilemmes. Nous arguons en conclusion que l'attaque directe de ces paradoxes est intrinsèquement vouée à l'échec en ce qu'elle interdit de les normaliser, d'en faire des phénomènes linguistiques "normaux". III. Les paracosmies III.2. Typologie des paradoxes scientifiques et cognitifs Les paradoxes scientifiques ou, plus généralement, les paradoxes cognitifs sont ceux qui révèlent un conflit entre des faits admis par le sujet. III.2.ii. Les paradoxes affirmants Le cas le plus évident de tels paradoxes est ceux qui explicitent une contradiction entre l'intuition du sujet et les faits tels qu'ils sont présentés par une théorie (confirmée par l'expérience ou au moins tenue pour "vraie" par le sujet). Cette présentation peut prendre la forme d'une observation (p.e. expérimentale, comme dans les paradoxes de la relativité), de la référence à des structures universelles de la pensée (p.e. des principes de symétrie comme dans les paradoxes de l'irréversibilité), d'une démonstration (p.e. dans les paradoxes mathématiques), d'une référence à un système admis (tel qu'une axiomatique). Cette affirmation n'est pas nécessairement forte et n'a pas nécessairement à convaincre le sujet, elle se contente parfois de rappeler un fait connu ou de susciter une croyance déjà lattente. Entre un pôle d'autorité et un pôle de révélation, existe toute une gamme de tels paradoxes. Ces paradoxes soulignent combien des théories apparemment essentiellement techniques baignent en fait dans un substrat culturel extrêmement riche et contradictoire en de nombreux points avec ce qu'elles affirment. Les paradoxes sont largement utilisés pour défendre les conclusions de ces théories contre l'intuition du sujet qui, sinon, les déformerait (à son insu). Pour autant ces paradoxes ne combattent pas nécessairement ces intuitions opposées et, au contraire, les instrumentalisent souvent pour accroître leur force. III.2.iii. Les paradoxes réfutants Les paradoxes scientifiques n'apparaissent pas systématiquement comme des affirmations ; certains sont d'abord la réfutation de conceptions du sujet sur la base d'une expérience de pensée. Les représentations qui sont ici mises en jeu sont donc seulement celles du sujet. Dans ce cadre on sort souvent du champ des sciences pour trouver des paradoxes relevant de l'intuition "quotidienne" (y compris pour des paradoxes présentés sous un habillage technique comme le paradoxe de Simpson). Ces paradoxes réfutent souvent des symétries, des analogies ou des coïncidences établies indûment. Ils montrent combien des concepts centraux et omniprésents se révèlent contradictoires. III.2.iv. Les paracosmies, au-delà de réfutations et affirmations Nous montrons par quelques exemples qu'il existe un continuum de paradoxes entre les deux catégories de paradoxes cognitifs, affirmants et réfutants. En plus de dépendre, comme toute notre analyse, du sujet interprétant le paradoxe et de l'approche qu'il choisit d'adopter, celui-ci peut relever des deux catégories sous des aspects différents : les représentations du sujet ne sont pas données "complices de notre connaissance". Nous définissons finalement les paradoxes cognitifs comme les paradoxes relevant de l'explicitation au moyen d'une expérience discursive d'une antinomie entre "faits" présentés comme des vérités. Ces faits peuvent être de tous ordres, aussi bien factuels (expériences, événement, etc.) que structurels (relations entre objets abstraits). Ils doivent seulement pouvoir être assumés par le sujet, qu'ils émergent de ses représentations, qu'ils soient crus explicitement, qu'ils soient reçus d'autorité ou par une démonstration, etc. Les phases démonstratives de ces paradoxes sont généralement simple et gagnent par là d'autant de force. III.3. Analyse des paracosmies III.3.i. Analyse d'exemples historiques Le premier trait marquant des discussions des paradoxes scientifiques et a fortiori cognitifs est leur extrême éclatement. Ceux-ci ne sont discutés que domaine théorique par domaine théorique, voire paradoxe par paradoxe. Il nous était donc impossible d'étudier l'histoire d'un grand nombre d'entre elles : nous nous sommes limité à observer la discussion des paradoxes cinématiques de Zénon d'Elée et du paradoxe du ciel en feu (dit d'Olbers). Ces discussions montrent notamment les faits suivants. Malgré l'immense variété de leurs interprétations, le sens immédiat de l'histoire du paradoxe est bien lu de la même façon par tous. Dès qu'une solution est perçue par le sujet la difficulté du paradoxe disparaît pour lui au point qu'il lui parraît le plus souvent évident et ce quand bien même les plus grands esprits auraient pu le considérer comme délicat (ceci est vrai aussi bien dans le domaine que de la part de commentateurs, historiens par exemple). Les solutions de ces paradoxes sont toujours la simple expression de la lecture de l'histoire du paradoxe au travers d'une grille de lecture théorique. En particulier les grandes solutions de ces paradoxes suivent l'évolution des grandes conceptions du domaine théorique. D'autre part, chaque penseur tend à lire ses propres questions dans tout paradoxe scientifique. III.3.ii. La pédagogie comme imposition habituelle Nous rapprochons ici le paradoxe de Gallilée de l'énigme enfantine du kilo de plomb et du kilo de plume et d'un équivalent sensori-moteur de ces paradoxes : ils suggèrent qu'une telle énigme est largement employée pour imposer une grille de lecture du "pesant" qui n'est pas (initialement) intuitive. Nous interprétons de la même façon le paradoxe suscité par l'expérience de Müller-Lyer. III.3.iii. Conclusions sur les paracosmies Un lieu commun veut que les paradoxes soient des failles qui permettent, par la critique, le renouvellement des théories. Les faits montrent le contraire : les paradoxes ne précèdent pas les évolutions de leur théorie-cadre, ils les suivent et ne sont qu'accessoirement les contradicteurs des opinions précédentes. Il est notable qu'ils sont généralement diffusés avec une solution. Le discours sur ces paradoxes est toujours marqué par la volonté d'une solution, mais il ne s'agit jamais ici de la trouver directement. Celle-ci, pour les sujets, doit toujours être déduite d'une théorie générale servant à interpréter la petite histoire du paradoxe.Les paradoxes scientifiques ne sont pas toujours discutés pour leur contenu réel mais sont parfois chargés d'une valeur emblématique. Comme les paradoxes classiques de la Mécanique Quantique, ils servent alors de point de départ conventionnel à des discussions théoriques de fond.Le rôle d'un paradoxe peut être d'imposer une grille de lecture (il y a imposition pédagogique) mais qu'il ne tend pas pour autant à combattre (directement) les lectures intuitives opposées, mais bien plutôt à s'appuyer sur elles pour augmenter sa prégnance et donc impact sur le sujet et de là sa persistance et sa propagation (phénomène de retenue pédagogique).Nous montrons enfin que les paradoxes cognitifs correspondent à la classe des paracosmies que nous avons définie. Ils ne rencontrent pas les paradoxies ni les paralogies. IV. Les paralogies IV.1 et 2. Définition et présentation de cas Selon notre approche les paralogie ne sont pas définies (normativement) comme découlant d'une erreur de raisonnement mais comme recélant une errance dans le raisonnement, un découplage entre ce que le raisonnement produit et ce qui en est attendu par le sujet. De plus, nous ne considérons pas de système de déduction normativement fixé mais considérons des étapes de raisonnement découlant de règles admises (à "tort" ou à "raison") par le sujet. Le paradoxe découle de la différence entre la représentation de ces règles et l'idée qu'il s'en fait : il est satisfait intellectuellement, mais insatisfait cognitivement. Les éléments les plus usuels et les plus "sûrs" du raisonnement sont susceptible d'engendrer des paralogies. Ainsi la notion même d'identité et d'individu est problématique comme le montre l'exemple du bateau de Thésée (dont toutes les pièces ont été remplacées au moins une fois). La notion de désignation n'est pas moins problématique comme le montre l'exemple de l'Electre ("Electre ne connaît pas cet homme voilé, mais celui-ci est Oreste, donc Electre ne connaît pas son frère"), discuté sous des formes diverses depuis l'Antiquité. Les prédicats eux-mêmes, toujours vagues, peuvent être sources de paralogies comme le montrent les paradoxes sorites (par exemple "1 est un petit nombre, or un petit nombre plus 1 reste petit, donc 2 est petit, 3 de même,… et 100 est toujours petit"). Sur les exemples élémentaires les commentateurs s'accordent dans une large mesure sur la fausseté de l'argument mis en jeu par la paralogie. Ceci n'est pas le cas général : les paralogies les plus évoluées opposent souvent deux raisonnements entre lesquels se partagent les penseurs. C'est en particulier le cas des paradoxes de Leslie et de Newcomb, actuellement en débat. IV.3. La preuve ontologique de l'existence de Dieu La preuve ontologique de l'existence de Dieu, formulée par saint Anselme au 11e s., et sa discussion, particulièrement à la suite de Descartes (17e s.), montrent tous les aspects d'une paralogie, ce qui en fait l'exemple le mieux documenté.Nous présentons dans notre thèse les grandes lignes de cette discussion. IV.4. Conclusions Le premier point marquant est qu'une paralogie est aussi futile pour certains penseurs qu'elle est cruciale pour d'autres, sérieux voire de premier plan.La discussion voit s'opposer deux "camps" entre lesquels le débat et faible et évolue lentement, voire n'évolue pas du tout. Chacun tend à voir sa position comme évidente (et la développe d'autant moins) et les penseurs de l'autre "camps" comme fous, insensés.La discussion des paralogies ne rencontre pas le domaine expérimentable et reste largement dans l'"invérifiable". Bien que les sujets aient généralement le sentiment que le paradoxe résulte d'une erreur de raisonnement, le débat le concernant ne se place qu'exceptionnellement dans un cadre logique. Le cadre est, au contraire, souvent extrèmement large et utilise des considérations issues de domaines du savoir très variés. V. Conclusion générale V.1.i. Les groupes phénoménaux et classes structurelles Tous les paradoxes que nous avons étudiés rentrent de façon claire dans l'une de nos trois classes à l'exception près des paradoxes de seconde génération qui semblent, à première vue, être des dilemmes logiques mais sont en fait des paracosmies, comme le montre une analyse plus poussée. Notre tripartition est donc opératoire. Les traits que nous catalogons dans cette partie montrent qu'elle est également pertinente. V.1.ii. Vie et survie du paradoxe Tant qu'un paradoxe d'est par résolu de façon satisfaisante par un sujet, il reste vivant. S'il est suffisamment fort et universel, il sera transmis à d'autres sujets. L'universalité découle de la simplicité de son énoncé. Ce qui fait sa force est différent dans les trois cas : pour les paradoxies il s'agit du sentiment de symétrie ou d'identité des "deux" propositions opposées, pour les paracosmies de la différence d'enracinement des théories confrontées, pour les paralogies de la similarité de l'attachement aux règles menant aux conclusions opposées. Corollairement à ce point nous noterons que les paradoxies se distinguent par l'importance que revêt très fréquemment l'investissement du locuteur de l'histoire (au sens linguistique). V.1.iii. Les solutions et les manières de les aborder Les paracosmies apparaissent toujours dans des domaines où un recours expérimental, à une autorité, est, en principe, possible. Pour cela, les chercheurs verront toujours une solution à une paracosmie comme résultat d'une théorie générale. On ne peut donc voir ces paradoxes selon le lieu commun des "remparts contre les préjugés". Ces deux traits les distinguent résolument des autres paradoxes : les paradoxies et paralogies sont, au contraire, attaquées directement, pour elles-mêmes. Par ailleurs, la discussion de nombreuses paradoxies montre un phénomène important de reformulations successives ou parallèles du paradoxe, de réinterprétation de l'histoire, soit pour éliminer soit pour restaurer le paradoxe. La durée de vie de leurs solutions est donc particulièrement faible. Pour les[...]

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Les travaux de recherche proposés proviennent de deux sources contiguës. La première étant l'expérience acquise après plusieurs années consacrées à la formation professionnelle initiale et continue des professeurs des écoles en IUFM; et la seconde de mes travaux conduits dans le cadre de la préparation du DEA/Master de construction des savoirs scientifiques à l'université Claude Bernard Lyon 1. Ces deux enrichissements complémentaires m'ont progressivement conduit à interroger la dimension expérimentale des mathématiques en tant que démarche d'accès aux savoirs et de construction des connaissances; l'enjeu résidant notamment dans l'étude de la signification des objets mathématiques. Cette dimension est étudiée selon deux paradigmes de recherche, l'un dans le champ de l'histoire et l'épistémologie des sciences, et l'autre dans celui de la didactique des mathématiques. L'apport historique est envisagé avec un statut d'outil pour la recherche et non pas à proprement parlé avec de véritables objectifs de découverte. Il fournit un éclairage dans la compréhension des processus de construction des connaissances et d'appropriation des savoirs établis, et plus particulièrement dans les difficultés qui leurs sont associées. Ce faisant, il est aussi être question de souligner la récurrence des bouleversements des certitudes scientifiques et autres changements de paradigmes qui jalonnent l'histoire des sciences tant dans la construction que dans la diffusion des connaissances. L'apport épistémologique permet quant à lui une interrogation du statut des objets mathématiques. Le champ didactique est celui de la recherche de situations didactiques qui, tout en prenant en compte les apports historiques et épistémologique, peuvent mettre en évidence les caractéristiques d'un milieu spécifique à la prise en compte de cette dimension expérimentale. Il s'agit aussi d'une étude des modèles de fonctionnement des connaissances en situation de résolution de problèmes. Pour cette étude, nous nous appuyons sur la notion de milieu dans la théorie de situations didactiques (Brousseau, 1988) et plus précisément sur l'étude des conditions et des caractéristiques du milieu pouvant être considéré comme celui d'une situation expérimentale en référence aux travaux de Bloch (2001). Une de nos hypothèses de recherche étant que le savoir de l'élève (à la manière du savoir scientifique) se construit en interaction synergique entre les idées (développement d'hypothèses) sur l'action et le fonctionnement d'un objet; et sur la formulation langagière.

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En France, la réaction sociale à la crise psychique est essentiellement assurée par les urgences de l’hôpital psychiatrique public qui sont confrontées à des difficultés d’ordre économique, conjoncturel, et moral. Cependant, les principales orientations politiques nationales et internationales ont adopté les principes du rétablissement, et préconisent le développement d’alternatives aux urgences psychiatriques conformément aux revendications des (ex)usagers de la psychiatrie. Comment se fait la réception française de cette nouvelle politique de santé mentale ? Ainsi, la thèse analyse l’expérience individuelle et sociale de la crise psychique par l’ethnographie d’un dispositif innovant, le Lieu de Répit Marseille, qui propose un accueil soutenu de la crise psychique par le savoir expérientiel en alternative à l’hospitalisation. L’observation des interactions entre les acteurs (usagers, proches, professionnels de santé, etc.) révèle l’incidence du cadre moral sur l’expérience vécue de la crise psychique. La thèse montre une hiérarchisation sociale subit par les (ex)usagers de la psychiatrie qui imprègne les modalités de soin, et le Stigmate (Goffman, 1975) que représentent les troubles psychiques participe à l’instauration d’une méfiance vis-à-vis de l’institution hospitalière. La valorisation des savoirs expérientiels et du travail pair au lieu de répit permet de partager l’expérience des troubles, et d’instaurer de nouvelles normes relationnelles qui produisent des effets thérapeutiques. La participation des (ex)usagers aux niveaux micro, méso, et macrosocial entraîne l’évolution des interactions sociales, et représente un levier pour améliorer la réponse à la crise psychique. La thèse s’est intégrée à une recherche-action participative qui a accompagné la construction du modèle interventionnel. Dans un premier temps, une analyse des trajectoires hospitalières est réalisée, puis le dispositif innovant est situé dans une perspective historique et spatiale. Le processus de recherche-action participative est analysé, ainsi que le lexique local qui révèle les normes morales des acteurs, et les représentations sociales associées à la psychose. La seconde partie précise les modalités pratiques du dispositif et souligne la complexité organisationnelle induite par la crise psychique. Le travail émotionnel réalisé par les intervenants est souligné et mis en lien avec les spécificités du travail pair, ses apports et les modifications identitaires qu’il induit. Pour finir, les parcours de rétablissement des usagers du lieu de répit sont analysés.

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La presente investigación gira en torno al pensamiento del filósofo francés Gilbert Simondon. Exploramos la posibilidad que abre Simondon para articular un monismo ontogenético con un pluralismo ontológico, esto es, la idea según la cual es posible apreciar una continuidad entre las diferentes dimensiones de lo real -física, biológica, psíquico-colectiva- sin negar por ello su pluralidad intrínseca. En la primera parte, realizamos un estudio de la relación entre materia inerte y seres vivos por medio del encuentro entre la filosofía simondoniana de la individuación y la termodinámica del no-equilibrio desarrollada por Ilya Prigogine. La concepción de Simondon se muestra como una vía apropiada para superar la división ontológica entre materia y vida. Sin embargo, su focalización en la cristalización como ejemplo paradigmático de individuación física revela ciertas limitaciones para llevar a cabo este proyecto, las cuales pueden ser superadas por medio del concepto de una auto-organización de la materia presente en la termodinámica del no-equilibrio. En la segunda parte, realizamos una interpretación de los principales puntos de la metafísica de Simondon. Seguimos la lectura deleuziana en la cual la filosofía de Simondon aparece como una transformación del concepto kantiano de lo trascendental. A continuación, defendemos una interpretación según la cual el pensamiento de Simondon constituye una forma de realismo procesual-relacional. Finalmente, realizamos una confrontación de la filosofía simondoniana con el giro especulativo de la filosofía actual, especialmente con el materialismo especulativo de Quentin Meillassoux y la filosofía orientada a los objetos de Graham Harman.

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Emmanuel Barot Université de Paris X – Nanterre, Septembre 2004 Thèse de Philosophie, sous la direction du professeur Jean-Michel Salanskis. L’AVENTURE MATHEMATIQUE DE LA DIALECTIQUE DEPUIS HEGEL Perspectives sur les visages contemporains du « problème de la dialectique » en épistémologie des mathématiques et de leur histoire Résumé Hegel a consacré la naissance du problème philosophique de la détermination conjointe du caractère historique de la rationalité, et du caractère rationnel du processus historique, sur le fond et dans les termes du procès d’auto-réalisation dialectique du Concept. C’est avec lui que l’historicité et la rationalité des formations conceptuelles, et en particulier des théories scientifiques, deviennent un (sinon le) objet central du discours philosophique sur les sciences. Les schèmes dialectiques qu’il utilise vont constituer un outil matriciel, pour l’épistémologie continentale des XIXème et XXème siècles, de la prise en charge de ce problème, et cela tout particulièrement dans le double champ de l’épistémologie des mathématiques et de l’épistémologie de l’histoire des mathématiques (CHAP. I). Ce champ intrinsèquement double répond à l’exigence de rendre raison d’une double objectivité mathématique : celles des théories comme produits de l’histoire, et celles des objets intrathéoriques. Et depuis Hegel jusqu’à aujourd’hui, deux traditions essentielles mobilisent le mode de penser dialectique dans ces domaines, sur le fond de la thèse kantienne selon laquelle la connaissance mathématique n’est pas une connaissance d’objets, mais une connaissance dont il est exigé d’appréhender les conditions de l’objectivité. A partir de ce germe kanto-hégélien, sont effectuées les généalogies de ces deux traditions que sont l’épistémologie marxiste d’une part (Marx, Engels, Lénine, les avatars de la dialectique de la nature, Lefebvre, la refonte sartrienne de la Critique de la raison dialectique, et l’école althussérienne : CHAP. II ET III), et l’épistémologie rationaliste « à la française » d’autre part. Celle-ci est issue de la digestion de l’hégélianisme par les post-kantiens français du XIXème Cousin, Renouvier, Hamelin et Brunschvicg, et ses protagonistes essentiels sont Bachelard, Gonseth, Cavaillès et Lautman (CHAP. IV), Granger et Desanti étant leurs héritiers contemporains (CHAP. V). Tout notre travail expose progressivement les aléas qu’a subi le terme de « dialectique » en ces lieux épistémologiques, les récurrences et les variations statutaires des méta-discours dialectiques sur les mathématiques et sur leur histoire, et les injonctions systématiquement déployées par ces méta-discours : en particulier, la déconstruction des concepts d’objet et d’existence mathématiques, et la posture constructiviste de la critique diversement déclinée des formes diverses de réalisme mathématique. On montre également que l’école dialectique française, non hégéliano-marxiste, est en réalité extrêmement affine à la rénovation néo-kantienne du transcendantal assurée de façon emblématique par Cassirer (CHAP. V). Le fil conducteur de cette thèse est le problème du type de scientificité revendiqué ou non par les méta-discours dialectiques depuis Hegel dans leurs relations aux sciences positives (et centralement aux mathématiques), c'est-à-dire aussi le type de rivalité ou d’incompatibilité éventuelles entre la logique analytique des mathématiques et la logique dialectique de la contradiction. Oscillant entre science supérieure prétendant livrer la vérité des mathématiques, ou simple épistémologie « réflexive » et descriptive laissant la part belle aux sciences positives, ces méta-discours se sont toujours pensés comme des discours seconds par rapport aux sciences, mais parfois au travers d’une exigence problématique de fondation rétrospective qui a pu conduire au dogmatisme (ainsi le rôle de la dialectique de la nature dans la sclérose théorique et pratique qu’a constitué le « diamat »). La question que l’on se pose finalement est celle du type de légitimité et simultanément, d’humilité, qu’il est dorénavant possible et souhaitable de défendre pour ce discours dialectique dans le rapport à son autre qu’est le scientifique. Cette thèse est donc certes une synthèse historique qui procède à la généalogie des usages majeurs des schèmes dialectiques en épistémologie continentale des mathématiques et en épistémologie de leur histoire. Mais cette synthèse est aussi et tout autant programmatique : sont finalement repris les traits jugés essentiels de cette aventure aux fins de sa poursuite et de son approfondissement théoriques, à partir d’un dispositif synthétique issu en particulier d’une articulation des marxismes critiques de Sartre et Althusser.

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In "La Géométrie," Descartes proposed a “balance” between geometric constructions and symbolic manipulation with the introduction of suitable ideal machines. In particular, Cartesian tools were polynomial algebra (analysis) and a class of diagrammatic constructions (synthesis). This setting provided a classification of curves, according to which only the algebraic ones were considered “purely geometrical.” This limit was overcome with a general method by Newton and Leibniz introducing the infinity in the analytical part, whereas the synthetic perspective gradually lost importance with respect to the analytical one—geometry became a mean of visualization, no longer of construction. Descartes’s foundational approach (analysis without infinitary objects and synthesis with diagrammatic constructions) has, however, been extended beyond algebraic limits, albeit in two different periods. In the late 17th century, the synthetic aspect was extended by “tractional motion” (construction of transcendental curves with idealized machines). In the first half of the 20th century, the analytical part was extended by “differential algebra,” now a branch of computer algebra. This thesis seeks to prove that it is possible to obtain a new balance between these synthetic and analytical extensions of Cartesian tools for a class of transcendental problems. In other words, there is a possibility of a new convergence of machines, algebra, and geometry that gives scope for a foundation of (a part of) infinitesimal calculus without the conceptual need of infinity. The peculiarity of this work lies in the attention to the constructive role of geometry as idealization of machines for foundational purposes. This approach, after the “de-geometrization” of mathematics, is far removed from the mainstream discussions of mathematics, especially regarding foundations. However, though forgotten these days, the problem of defining appropriate canons of construction was very important in the early modern era, and had a lot of influence on the definition of mathematical objects and methods. According to the definition of Bos [2001], these are “exactness problems” for geometry. Such problems about exactness involve philosophical and psychological interpretations, which is why they are usually considered external to mathematics. However, even though lacking any final answer, I propose in conclusion a very primitive algorithmic approach to such problems, which I hope to explore further in future research. From a cognitive perspective, this approach to calculus does not require infinity and, thanks to idealized machines, can be set with suitable “grounding metaphors” (according to the terminology of Lakoff and Núñez [2000]). This concreteness can have useful fallouts for math education, thanks to the use of both physical and digital artifacts (this part will be treated only marginally).

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Ce travail consiste en une édition, une traduction française et un commentaire du traité pseudo-aristotélicien Περὶ ἀτόμων γραμμῶν. L'édition est faite à partir de la recension effectuée par D. Harlfinger en 1971 de tous les manuscrits connus contenant ce traité. Dans l'édition, le plus souvent, la lecture des manuscrits a été préférée aux éventuelles corrections des éditeurs et commentateurs. La traduction se veut la plus proche possible du texte grec nonobstant son caractère très elliptique et, parfois, syntaxiquement fautif. Le commentaire s'attache en premier lieu à contextualiser ce texte (hypothèses de datation à défaut de pouvoir l'attribuer indiscutablement à tel ou tel auteur) et à déterminer les liens qu'il y a entre lui et, d'une part, les autres textes du corpus aristotélicien et, d'autre part, les traités philosophiques qu'il réfute. En outre, le commentaire permet de justifier les choix éditoriaux et de traduction en comparant la leçon retenue aux variantes existantes et aux corrections apportées par les éditeurs et commentateurs successifs du traité. L'objectif du Περὶ ἀτόμων γραμμῶν est de démontrer l'impossible existence de lignes indivisibles. Il prend place dans une réfutation générale de l'atomisme dans l'école aristotélicienne. Aristote avait réfuté l'existence des atomes dans le domaine physique, y opposant une théorie continuiste, l'auteur de ce traité reprend ce problème en l'appliquant aux objets géométriques. Il démontre l'impossibilité qu'une ligne soit indivisible ou composée d'indivisibles, puis, après avoir défini le point, l’impossibilité qu'une ligne en soit composée. Enfin, l'auteur établit une distinction entre limite et articulation.

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En partant d’une redescription des relations de l’agriculture à la précarité, entendue comme un sentiment complexe à la croisée des expériences de l’instabilité ontologique, de l’incertitude épistémique et de l’insécurité sociale, l’objet de cette recherche est d’abord de saisir le rôle d’une certaine rationalité modernisatrice dans le processus de transformation de l’agriculture française au tournant des années 1960-1970 : ce que nous nommons le vitalisme entrepreneurial. Cette formule désigne une réforme de la légitimation de la société de marché qui repose non plus sur sa naturalisation, comme dans le libéralisme classique analysé par Polanyi, mais sur une vitalisation évolutionniste des logiques de marché et de concurrence. Une bascule depuis l’ordre de la nature vers le désordre de la vie, où l’intensité vitale se confond avec le risque économique, et qui trouve l’un de ses fondements philosophiques en France dans l’évolutionnisme moraliste et modernisateur de Bergson. En agriculture, ce vitalisme constitue un levier puissant pour déplacer la précarité légitime depuis les relations aux vivants vers les relations commerciales, défaisant le paysan pour instituer l’agri-entrepreneur. En examinant le rôle discret, mais structurant, de ce vitalisme entrepreneurial, influencé par la pensée néolibérale, dans les politiques agricoles françaises et leurs légitimations théoriques et politiques, nous cherchons à montrer l’importance croissante de la double figure de l’ingénieur (agronome) et de l’entrepreneur (agricole) dans ce processus. Le premier comme agent du surcontrôle agrotechnique des dynamiques du vivant, le second comme nouvelle norme du travail agricole, pris dans un rapport constant aux instabilités des processus marchands. Nous essayons ainsi de caractériser la modernisation agricole comme un renversement de la précarité légitime, depuis la relation labile et variable aux vivants qui caractérise les pratiques paysannes, vers la relation aux marchés qui structure et détermine l’agro-industrie modernisée. Ce travail historique nous permet de mieux comprendre ensuite, à partir d’enquêtes de terrain, la manière dont des pratiques agroécologiques contemporaines radicales cherchent à refaire de la place aux instabilités des vivants, en imaginant des pratiques, des techniques et des relations non dualistes. Pour autant, en mettant davantage l’accent sur des dispositifs techniques sans dessiner une logique proprement politique permettant leur généralisation, nous soutenons que ces pratiques agroécologiques, tout en demeurant structurellement marginales, ne parviennent pas à se libérer réellement du régime de précarité issu de la modernisation et du cadre entrepreneurial dominant, qui continuent de leur imposer la logique du marché comme réalité supérieure. Le dernier enjeu de ce travail est donc d’esquisser les conditions sociales et politiques d’une bascule de la précarité légitime depuis les aléas du marché vers les instabilités du vivant, permettant la constitution d’un front agroécologique pensé et vécu comme un véritable mouvement social. Dans cette perspective, nous nous efforçons d’ébaucher en conclusion une réflexion philosophique opposant deux logiques institutionnelles, l’arche et la forteresse, afin de penser plus précisément l’articulation d’une condition terrestre et d’un devenir politique à la fois destituant et instituant. Ainsi, il s’agit notamment d’envisager la multiplication concrète des dispositifs d’érosion, au sens d’Erik Olin Wright, du capitalisme agricole modernisateur, en nous inspirant plus particulièrement des logiques autogestionnaires de mise en sécurité sociale, visant à la fois la conquête d’une souveraineté politique sur l’attribution de la valeur, la délibération démocratique sur les stases légitimes, ainsi que la réappropriation collective des moyens d’expérimentation, pour inventer des pratiques agricoles relationnelles, émancipatrices et durables avec les autres qu’humains.

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A la croisée de l'histoire de l'archéologie, de l'anthropologie des savoirs et de l'histoire du livre, cette thèse vise à comprendre la mise en livres, en images et en savoirs de la mythologie gréco- romaine, en France et en Allemagne, entre le XVIIIe siècle et la première moitié du XIXe siècle. Alors que le rythme d'institutionnalisation de l'archéologie diffère fortement dans les deux pays, cette période se caractérise également par une transformation des modalités d'analyse des objets issus de l'Antiquité. On passe d'un régime d'image antiquaire à un traitement scientifique des vestiges antiques et notamment mythologiques. Ces représentations mythologiques font alors l'objet d'interprétations de plus en plus spécifiques dans le champ de l'archéologie naissante. Cette thèse vise à montrer comment la mythologie, via ses reproductions, devient objet de savoir de cette discipline émergente. La matérialité de ce processus, l'interprétation de ces images, la construction de traditions bibliographiques ainsi que les lieux et moyens d'usage de ces représentations sont des angles d'approche qui traversent cette recherche. Elle vise à éclairer, sous l'angle des images, la fabrication de la science archéologique au XIXe siècle, permettant un utile retour réflexif et épistémologique sur ces pratiques savantes.

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