Seins, reconstruction, et féminité. Quand les Amazones s’exposent
Résumé
Les seins étant considérés dans nos sociétés comme l'emblème du féminin, leur perte est d'emblée associée à la perte de féminité, et le parcours de masculinisation des hommes trans qui procèdent à une mastectomie atteste d'une telle représentation. Pour les femmes atteintes d'un cancer du sein dont la mastectomie n'est pas choisie mais subie, la « reconstruction » mammaire, présentée avant tout comme une opération de « réparation » d'ordre médical, a également un but sexuel moins avoué, visant à modeler le corps féminin selon des fantasmes masculins, comme le montre le fait qu'une augmentation mammaire accompagne généralement la reconstruction chirurgicale. Si certaines femmes acceptent plus ou moins bien la reconstruction mammaire, d'autres la refusent, témoignant qu'il est possible d'être une femme avec ou sans seins. Ainsi, l'association Les Amazones s'exposent, ou encore l'artiste bulgare Boryana Rossa, affichent leur nouvelle identité d'Amazone, remettant en cause l'idée d'une féminité restreinte aux corps pourvus de seins. Consécutives à la mastectomie, les cicatrices, associées à la virilité, questionnent les codes corporels du genre. Le thème des cicatrices et des mutilations est au coeur du travail artistique de Sophie Ristelhueber, de Kai Widenhöfer, et de Kader Attia, celui-ci rendant compte « en images » de la manière spécifique dont les sociétés occidentales appréhendent la réparation par rapport aux autres sociétés.
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)